Le célastrol, extrait d’une plante chinoise, permettra-t-il le développement d’une pilule contre l’obésité ? Après des années de tentatives et d’échecs retentissants, une nouvelle piste sérieuse vient d’émerger. Depuis 1994, les spécialistes du métabolisme humains connaissent l’hormone de la satiété, c’est-à-dire le messager qui est envoyé dans le corps, plus précisément au cerveau, pour signaler le trop plein énergétique. Cette hormone, la leptine, est donc la grande responsable du contrôle de notre poids dans le sens où elle nous indique le moment du repas où notre corps a accumulé suffisamment de kilojoules pour continuer ses activités normales. Si la personne continue de manger, ce surplus énergétique sera emmagasiné dans les tissus adipeux. Dans son rôle de contrôler le poids de l’organisme, la leptine peut aussi brûler une quantité de graisse superflue. Chez les personnes qui souffrent d’obésité due à des excès alimentaires, l’organisme a développé une tolérance à la leptine et la réponse à l’augmentation de leptine dans le sang, même à de très haut niveau est nulle. C’est à ce niveau qu’une équipe de chercheurs de l’École de Médecine de Harvard a décidé d’intervenir. L’équipe d’Umut Ozcan a recherché une substance qui puisse redonner aux tissus leur sensibilité à la leptine afin de lui redonner son action. Après le criblage de plus d’un millier de molécules, ils ont isolé le célastrol, présent dans une plante médicinale chinoise, le lei gong teng, littéralement traduit par « vigne du tonnerre divin » (Tripterygium wilfordii). Appliquée au modèle de l’obésité chez la souris, la substance a répondu aux attentes des chercheurs. Après trois semaines de consommation de célastrol, les animaux prenaient trois fois moins de nourriture et avaient perdu 40 % de leur poids initial. Leurs taux sanguins en leptine mais aussi en sucre et en cholestérol étaient revenus à la normale. Une activité métabolique plus élevée éliminant les graisses a aussi été enregistrée, confirmant la reprise de l’action de la leptine. Les chercheurs ont également vérifié que la perte de poids ne concernait que la masse graisseuse, et non, par exemple, la masse musculaire, et que le traitement restait sans effet sur les souris non obèses. « Ce travail est très intéressant du point de vue thérapeutique, précise Julie Dam, chercheuse à l’Inserm, spécialiste de la leptine au centre de recherche de l’Institut Cochin à Paris. Pouvoir resensibiliser les personnes obèses à la leptine serait une avancée considérable. Pour l’instant, les médicaments déjà approuvés dans ce domaine ne sont pas vraiment efficaces et présentent des effets secondaires non négligeables. » La piste du célastrol va devoir être confirmée chez l’homme. Cette substance est déjà connue pour avoir des effets anti-inflammatoires et même antitumoraux in vitro. La mise au point d’un traitement adapté aux patients obèses pourrait prendre du temps, et la production du célastrol, une molécule complexe, sera limitée par son origine végétale. « Si les résultats sont reproduits chez l’homme sans effets indésirables sévères, un tel médicament ne devra pas pour autant nous dispenser de faire attention à notre alimentation », avertit néanmoins Julie Dam.
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