Des jeunes filles qui tremblent et s’évanouissent avec des convulsions. Un mal étrange frappe une petite localité dans le nord de la Colombie, où les habitants mettent en cause une campagne de vaccination contre le virus du papillome humain (VPH). A El Carmen de Bolivar, près du port de Carthagène, des dizaines d’adolescentes ont vécu les mêmes symptômes: les mains glacées, le visage blême et la perte de connaissance. «Ils m’ont vaccinée en mai et les premiers évanouissements ont commencé en août. Mes jambes sont devenues lourdes, je ne sentais plus mes mains. Quand je me suis réveillée, j’étais à l’hôpital», raconte à l’AFP Eva Mercado, 15 ans, après sept pertes de connaissance en un mois. Pour la plupart des familles touchées dans cette ville de 67 000 habitants, cela ne fait aucun doute. C’est le résultat de la campagne nationale de vaccination contre le VPH, une des infections sexuelles les plus courantes, qui peut déboucher sur des cancers de l’utérus. Le modeste hôpital Notre Dame est submergé par l’arrivée d’adolescentes inconscientes. Il n’est pas rare de voir des pères paniqués, venant y transporter leur fille inanimée à moto, sur les routes en terre de Carmen de Bolivar. Les médecins cherchent à constater une hypoglycémie ou une éventuelle trace de consommation de drogue. En vain. Selon un des responsables de l’hôpital, Augusto Agamez, quelque 370 mineures ont été prises en charge. «Il n’y a pas de diagnostic, ni de traitement spécifique», explique-t-il. Les jeunes filles reçoivent du sérum physiologique et de l’oxygène. Une fois rétablies, elles repartent en attendant la prochaine rechute. La vidéo (en espagnol) au bas de l’article démontre la détresse des parents amenant leur fille à l’hôpital. «Ils m’ont déjà emmenée seize fois à l’hôpital le mois dernier», témoigne Beatriz Martinez, 15 ans elle aussi. Pour elle, tout a commencé par des maux de tête et de dos, avant que ses membres ne soient atteints. Les jeunes filles atteintes ne sortent plus s’amuser dans les rues, certaines restant même cloîtrées. «Ma fille n’est plus la même», confie John Jairo Mercaco, un vendeur ambulant. Cette épidémie inexpliquée a soulevé un émoi dans tout le pays et le président Juan Manuel Santos est lui-même monté au créneau. Affirmant que la campagne de vaccination était sûre, le chef de l’Etat a évoqué un «phénomène de suggestion collective». Les parents sont inquiets parce que toutes ces filles de 9 à 16 ans avaient été vaccinées par le Gardasil dans les derniers mois. Selon les spécialistes de la santé et les toxicologues qui avaient été dépêchés pour recueillir des échantillons de sang, ainsi que pour évaluer les risques environnementaux possibles, il n’y aurait aucune preuve que le vaccin qui a fait l’objet de tests et de réglementation à l’échelle mondiale, soit à blâmer. Par contre, il est intéressant de savoir qu’au niveau des essais cliniques (toujours trop courts) du Gardasil, il y a eu 2,4% de jeunes filles vaccinées qui ont développé une maladie auto-immune, soit 300 fois plus que les taux officiels de notification d’effets secondaires à la pharmacovigilance (qui sont de 8 cas pour 100 000 vaccinations soit 0,008%) Même s’il a promis une série de mesures — recensement des patientes, nouveaux examens, aide psychosociale — , le ministre de la Santé Alejandro Gaviria a toutefois écarté l’idée de suspendre les vaccinations. «Nous n’avons pour le moment aucune raison d’arrêter», a fait valoir M. Gaviria.
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